Mes relations avec l’art et la culture sont de plusieurs ordres. Toutefois, ce que je reçois depuis mon enfance par mon père, mes inflexions personnelles et mes rapports nourriciers sont conservés sans classement, sans hiérarchie – ni disciplinaire ni personnelle. Je me sais construite, façonnée avec des artistes et des auteurs.
La littérature est, quant à elle, vivante grâce à quelques exemplaires issus de la bibliothèque familiale. Des lectures singulières qui me furent reprochées par mon père se sont établies comme des vitrines de mes fonds de commerce. Autant Hugo, Camus pouvaient être recevables mais E.A Poe, plus difficile… J’ai alors, 13 ans. L ‘expérience de lecture de ses œuvres traduites par Baudelaire demeure encore sacrée.
Mes rencontres artistiques sont d’abord sensorielles. J’entends dans ces maisons et appartements, des sons, des bruits, des instruments, des chants, solos et autres cris. Alors, ce qu’il m’est donné à entendre s’ancre tranquillement dès mes premières années d’existence. Cohabitent ensuite la musique et le cinéma au regard des émotions, des souvenirs et des revendication de ma jeunesse.

L’image fixe prend place avec les affiches de cinéma et les pochettes de vinyles. Ces étendards ont habillé les murs, étagères de mes espaces vitaux. Actuellement, les films sont astreints à leurs supports sans pour autant perdre en allure. Les disques sont des reliques sauvegardées précieusement.
Puis, les génériques de films, les scène d’ouverture, sans insistance, se classent comme des priorités. Je suis toujours à l’écriture des « génériques comme récits diégétiques ».
Antérieurement, créer des personnages, inventer des scènes, des répliques sont des actions qui ont crayonné mes années berlinoises. Sans y prendre garde, une matière s’inscrit. Mon adolescence s’opère avec des rédactions de textes. Plein cadre sur l’imaginaire et depuis, écrire achemine mes jours et nuits en plaisir. Le dessin, testé très tôt, se consumera vite mais l’idée d' »écrire des formes » séjourne encore aujourd’hui avec la photographie et la tentation de la gravure.
Certaines disciplines artistiques sont en présence depuis si longtemps dans ma vie au point qu’il m’est impossible de dresser une liste même non- exhaustive de mes analogies. C’est le cas du cinéma et de la musique.
En photographie, je pourrai réaliser un arbre généalogique, une connexion rêvée tout en métaphore. Ce ne sont pas des liens de conformité, des traits communs ni des ressemblances, plutôt une correspondance. Sans doute unilatérale, sédimentaire, j’imagine néanmoins ces connexions féminines.
JULIA MARGARET CAMERON

L’insoupçonnée ancêtre que pourrait incarnée Julia Margaret Cameron serait une pensée réjouissante. Une filiation fictive heureuse car la découverte de son travail provoqua un choc. Cette immersion dans une narration théâtrale fut fulgurante. Ses portraits, ses ambiances ont suscité ma 1ère inclinaison pour le Sépia. Sa poésie, sa tragédie répondent à un onirisme intime. Je sais l’attache de Cameron et de la famille Woolf comme portraitiste de la mère, Julia et de la fille, Virginia. Ceci me rapproche encore.
Exposition Julia Margaret Cameron (1815-1879), présentée au Musée des beaux-arts de Gand, Belgique (14 mars – 14 juin 2015).
« Les portraits puissants de Julia Margaret Cameron sont sans doute les plus célèbres, mais elle plaçait également les modèles qu’elle faisait poser pour elle – amis, famille et domestiques – dans un contexte biblique, historique et allégorique. Ses photographies étaient révolutionnaires pour différentes raisons : Cameron les gardait délibérément vagues, voire floues, et elles présentent des rayures, taches et autres traces du processus créatif. Son approche non conventionnelle a été critiquée, mais la beauté de ses compositions et son dévouement à la photographie en tant que forme artistique lui ont également valu de l’admiration. » Source
DIANE ARBUS
Un autre songe, une autre histoire me porte vers Diane Arbus. Elle m’a offert des visions humanistes dont la découverte marqua un tournant dans ma culture photographique.
Sans elle, je ne comprends plus une certaine partie du monde, avec elle, j’ouvre des yeux différents sur le cinéma. Je pense immédiatement aux jumelles dont Kubrick se serait inspiré pour celles de Shining. Je reçois, le travail de Diane Arbus, sur la singularité, la diversité comme un salut. Elle est une inspiratrice au même titre que Bruce Gilden non pas du point de vue de mes axes de recherches en photographie tels qu’ils se présentent ici mais par rapport à mes réflexions en photographie sociale.
Exposition Diane Arbus & rencontre, Jeu de Paume, Paris – 18 octobre 2011/ 05 février 2012
« Diane Arbus (New York, 1923-1971) a révolutionné l’art de la photographie ; l’audace de sa thématique, aussi bien que son approche photographique ont donné naissance à une œuvre souvent choquante par sa pureté, par cette inébranlable célébration des choses telles qu’elles sont. Par son talent à rendre étrange ce que nous considérons comme extrêmement familier, mais aussi à dévoiler le familier à l’intérieur de l’exotique, la photographe ouvre de nouvelles perspectives à la compréhension que nous avons de nous-mêmes. » Source
FRANCESCA WOODMAN
Enfin, une pensée touchante pour Francesca Woodman dont la découverte m’aida considérablement à endiguer certaines difficultés intimes.

Exposition française & rencontre
On being an angel – 11 mai au 31 juillet 2016, Paris, Fondation Cartier Bresson
« La Fondation Henri Cartier-Bresson présente l’œuvre fulgurante de la photographe américaine Francesca Woodman (1958-1981).
Par son travail profondément intime et sensible, fondé sur l’exploration perpétuelle du soi et du médium, elle fait de la photographie sa seconde peau. Francesca Woodman a quasi exclusivement utilisé son corps dans ses images, ainsi je suis toujours à portée de main, explique-t-elle, quand l’urgence de la représentation se manifeste. Malgré sa disparition prématurée à l’âge de vingt-deux ans, Francesca Woodman laisse une impressionnante production visuelle. Ses photographies dévoilent de multiples influences allant notamment du symbolisme au surréalisme mais sa précocité est prodigieuse. » Source
Bien à vous,
IPL, Avril 2019.
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