▲ Mulholland Drive, ⒾⓃⓋⒺⓈⓉⒾⒼⒶⓉⒾⓄⓃ
Est le dernier épisode d’une micro-histoire personnelle et majeure. Une volonté de m’offrir une approche spectatorielle, intime et disjointe grâce à un travail élaboré depuis des expériences de spectateurs connus, inconnus, prescripteurs officiels et officieux.
⓵ épisode: M.D En réception
⓶ épisode: M.D On air
◁ Partir du receveur, qui, convié à s’assoir, va regarder, lire, cet objet culturel.
⊿ Mulholland Drive a fait de nous des enquêteurs. Chacun.e nous avons tenté, parlé, essayé. Ce film a pu s’introduire dans nos vies respectives, à l’instar d’une épreuve, une succession d’observations, une expérimentation intérieure.
◌ De ce fait, nous sommes partis sur des routes, en direction d’une compréhension collective, commune, avec l’envie de partager des pistes, de nous mettre d’accord. Tandis que d’autres ont privilégié le face à soi.
La nécessité de l’enquête ?
◐ A partir d’ indications, certains se sont empressés de voir en Mulholland Drive, un cluedo, qui est mort, pourquoi et qui est qui ?
///
► Reprenons, là où nous nous étions arrêté :hier
⌑ Cette scène d’ouverture va nous renseigner plus sur le film que nous ne sommes en train de nous en douter. Dès le début, le tempo est donné, vous allez voir des images que vous corrèlerez par la suite, à la manière d’un collage, vous conserverez ces informations si vous êtes, suffisamment, attentifs.
La question du rythme
☰ D’entrée de jeu, vous aurez sous les yeux, à portée de main, des clés. Attention.
▢ Flou, violet et noir, des personnes se meuvent. Des couples dansent le Jitterburg (nom pour désigner un danseur de swing ou bien différentes variations de danses swing). Sur fond violet, deux lectures, au premier plan, de vrais danseurs, au second, des ombres noires ne reproduisent pas tout à fait les mêmes gestes et pas.
- Leur tenue vestimentaire pourrait comporter des indications temporelles.
- La couleur rouge depuis les chemises des hommes à une jupe prend le dessus sur les autres tons.
Rouge, blanc, noir
⌘ Rupture, une forme blanche se dégage du bas de l’image, un nuage, de la fumée ? Trois visages surexposés, en plein flash, nous parviennent, ils sourient à pleine dent. Une jeune femme blonde est entourée, par un homme et une femme, plus âgés, des parents, grands-parents ?
▕ Puis après un flou blanc émerge de la masse, une image saturée de la jeune femme, tout sourire, solaire, illuminée. Elle regarde en haut, comme le font les stars lorsqu’ils reçoivent des prix, des applaudissements, on pense à cette « adresse » faite à un public. Les trois personnages refont surface, de manière diffuse.
▪ 1’36, l’image reste nébuleuse mais la tonalité s’obscurcit, noir et rouge semble dominer. D’étranges sons, bruits se font entendre, une respiration saccadée, un drap rouge, une couverture, un oreiller, un lit ?
▪ 2’05, fondu au noir.
La musique comme couleur
▔ » Établir une relation ferme entre le visible et l’audible, délimiter un espace de signatures post-baudelérien entre les sons et les couleurs, voilà qui constitue presque une gageure. Bien sûr, tous les musiciens parlent de leur art en usant des adjectifs de la couleur : il est d’ailleurs moins question de dire qu’un passage est vert ou gris – ce que n’hésitait pas néanmoins à affirmer Kandinsky pour qui la trompette jouait en jaune – mais plutôt, et très communément, à parler de couleur comme d’un élément distinctif, différentiel. » Les couleurs de la musique
VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT
▗ Une musique à l’amplitude plus grave commence, le panneau directionnel « Mulholland Drive » s’affiche, sur éclairé, il semble clignoter, des phares ? Une lumière de la ville ? Noir, la nuit, un virage, une voiture, des phares, avant et arrière, transparaissent dans une image granuleuse. C’est le générique.
•Nous suivons à vitesse réduite, ce véhicule, sur une route sinueuse.
L’image comme unité de mesure
⊙ Les feux arrières se superposent, l’image se dédouble. La plaque minéralogique est donnée à lire, lors d’un plan au ralenti, quasi à l’arrêt. Ce plan fonctionne comme un hameçon, nous sommes accrochés à ce pare choc arrière. Les images se floutent passant les unes sur les autres, la nuit, avec toujours ces virages, les lumières de la ville se confondent avec les feux rouges du véhicule.
❂ Cette voiture disparait, happée par les lumières citadines. Un plan large nous fait prendre connaissance d’un nombre de lumières impressionnant, la nuit, une ville: Los Angeles.
////
La limousine comme personnage principal ?
◘ Blanche : Habituellement associées au glamour hollywoodien comme aux paillettes cannoises, ces longues voitures aux vitres fumées peuplent les premières images du Holy Motors de Leos Carax et l’un de ces fétiches de la modernité constitue le décor (voire le personnage) principal de Cosmopolis, de David Cronenberg. »source
❏ NOIRE, chez Mulholland Drive: A l’instar d’un personnage qui nous ferait un regard caméra, nous pouvons recevoir ces phares comme des yeux. Ce regard nous est adressé, il nous éblouit, nous hypnotise, nous berce pour mieux nous endormir.
•Il transperce la nuit, les lumières de la ville et finira pas s’évanouir, les yeux par se fermer ? Le 4 ème mur est-il brisé ?
////
░ Nous savons que David Lynch est féru de méditation transcendantale. Il incarne, au cinéma, la figure du chamane, celui, qui, par de subtils moyens, va ramener, au jour, un secret perdu.
///////////////
▔ La séquence de la voiture, où nous nous sommes quittés hier, reprend ses droits. Le soir. Les lignes de texte sont les mêmes pour les deux protagonistes féminines jusqu’à ce que deux changements s’opèrent, en face.
⊿Ils ne sont plus deux mais un seul à l’avant (chauffeur) de la limousine. Il n’y a plus d’arme, mais le mot « surprise« . La voiture s’arrête. La portière s’ouvre, Camilla (ne porte pas la même tenue que lors de la scène d’ouverture du début, sa robe était noire mais plus courte) apparaît.
La question du chemin
⊿ Un raccourci est suggéré tel que Camilla l’indique pour parvenir à l’adresse. Ce mot nous ramène, à cette remarque diffuse mais tenace, que nous nous sommes faites lorsqu’après l’accident, la brune (pas encore Rita) choisissait de descendre ce même chemin arboré et obscure. Il fallait le connaître pour savoir où il pouvait, avec certitude, mener, non ?!.
▾ Le bois, comme matériau, dans les films/série chez Lynch, est très présent, depuis les forêts, arbres, bûche, scierie, éléments de décor, nous ne sommes que, moyennement étonnés, que cela soit par un endroit escarpé, sombre mais boisé que des éléments narratifs soient communiqués.
▾Alors que nous descendions ou, plutôt, que nous laissions descendre Rita, seule, à pieds, au début du film, nous prenons, désormais, à pieds, ce chemin avec les deux protagonistes féminines. Elles vont devoir gravir.
▲ Descendre, monter, remonter le temps ? Le chemin comme remontoir. Pour nous emmener Là où tout a commencé ?
◐Si cet élément est déclencheur, peut-être, pourrions-nous avoir accès, enfin, au climax, inévitable mais imprévisible, à même de justifier toutes les confusions légitimes qui sont les nôtres, à l’égard de Betty/ Diane et Rita/ Camilla, entre autre ?
• Le plus important ce n’est pas, en effet, l’objectif, mais bien le chemin que nous prenons pour y parvenir. Ici, il ne que peut que s’entreprendre à pieds. Là, où le véhicule ne peut passer, un raccourci, un gain de temps, vraiment ?
★ Nous atteignons la maison du réalisateur que nous reconnaissons grâce à la piscine. La logeuse, Coco, toute de rouge vêtue est là. Pourquoi ? Elle est, en fait, la mère du réalisateur… Etait-elle donc, vraiment, logeuse ?
∞ Flou, net. Nous apprenons que la tante est morte, nous en déduisons que le temps a passé entre le début de l’histoire et cette soirée. Nous comprenons que Camilla a été rencontrée sur un tournage de film. (Et non tel que cela nous a été présenté jusqu’alors), elle avait le 1er rôle et c’est elle qui aurait aidé Diane (blonde) à avoir des rôles dans ses films.
- Surgit l’idée de la dette, et surtout de la supériorité de la star. Diane, perçue comme seule narratrice de l’histoire (au début), s’avère être dépendante, tant professionnellement qu’amoureusement, de Camilla. Cette dernière que nous avions, un temps, imaginée captive d’un récit détient un important pouvoir. Elle possède même une réelle emprise sur Diane.
- J’ai vu l’image du film » Qu’est-il arrivé à Baby Jane » – Aldrich, 1962. La blonde, la brune, deux sœurs et une question de pouvoir et de dépendance d’une actrice déchue qui entraîne jalousie, folie…Hollywood, succès, Bette Davis, téléphone..Peut-être
//////
(retour) Flou, café.Tasse.
MIROIR et Double
• La séquence qui va suivre, entrecoupée par d’autres instants, va nous présenter les personnages sous d’autres lumières. Tel un miroir qui inverse les places, les lieux, les prénoms, les vies…
▵ Le réalisateur donne l’impression d’avoir changé. Deux femmes (Camilla et celle qui interprétait Camilla lors de l’essai cinéma) s’embrassent face à Diane.
➟ La vraie Camilla et la révélation du double (Camilla de l’essai), par ce baiser, concrétise une idée d’entièreté. Rencontrer son double, la division du soi, et l’intégrer à soi pour parfaire son propre tableau.
↾ (J’ai pensé à )La nouvelle, William Wilson (Edgard Allan Poe) explore clairement le thème du double qui hante ici le narrateur et le conduit à la folie. Pour Arthur Hobson Quinn, biographe de Poe, le double de Wilson représente sa conscience.
►Lors de cette soirée, des personnages font faire leur réapparition, le Cow-Boy, notamment.
△ Diane est en larme et l’annonce du -on imagine « mariage » entre Camilla et le réalisateur va engendrer une souffrance insupportable chez elle.
/////Changement de décor, Winkie’s, intérieur jour.
——La serveuse du début s’appelle désormais Betty. La tasse est la même que celle que nous avons déjà vu chez Diane.Dans un sac noir posé (nous supposons que c’est le même que celui du début) sur la banquette, Diane sort de l’argent liquide (idem contenu sac du début). En face, un tueur à gages ?
▵La phrase: « Plus que tout au monde. »
La clé de l’énigme ?

◃ La clé bleue refait son entrée. S’ensuit une séquence avec l’homme au cauchemar. ..
▵Retour au salon chez Diane, la clé bleue est sur la table basse. La tasse à café est la même que celle du bar. On toque à la porte.//…La clé pourrait représenter le passage à l’acte, le fait de s’en servir, d’être utiliser symboliquement comme objet pour accède, ouvrir.
▻Des personnages comme des carrefours sur une carte. Avec eux, se croisent d’autres. Sont-ils des passages obligés ? Mes mondes qui se recoupent, des informations qui, désormais, se tiennent ou une énième manière d’embrouiller toujours plus les pistes.
——-
▵Le Cow-boy, les personnes âges, la femme à la chevelure bleue de Silencio, quelques autres, disséminés ici et là.
CEUX PAR QUI ?
Louise Bonner

➤ Elle incarne l’archétype de la sorcière, elle sait qu’un malheur va se produire. Elle convoque à la fois le théâtre avec le personnage de Cassandre (le don de dire l’avenir), la culture populaire et tous les imaginaires associés de la sorcière, elle représente également une femme d’environ 70 ans (Lee Grant en a 76 pour le film), paria, désocialisée. Le pendant de la femme à la bûche (Log Lady) pour Twin Peaks et ses phrases mystiques ? Son revers de médaille ?
Un autre personnage, plus freak encore: celui du cauchemar de Dan.
➟Une SDF à l’allure sauvage, à rapprocher de l’idée de caverne, à son allégorie ? (Demeure souterraine – monde d’en haut/ accès et transmission de la connaissance) – A une vision du monde tribale, primitive, telle une gardienne et protectrice de la boite bleue.
- LA BOITE : Cette dernière pourrait être à comprendre de différentes manières en fonction de ses apparitions. Boite de Pandore (faire sortir les présents des profondeurs), monde inversé, passage du rêve à la réalité, nous pouvons aussi l’associer à la mort. Celle de Camilla. (petit retour) Lorsque Rita met la clef dans la boite, Betty disparait et tout se fait avaler par le Noir. Nous y compris. Trou noir, celui de Rita. C’est ici que prend sens le passage entre les deux parties du film, dans ce trou noir.
Le couple de personnes âgés
❒ La scène d’ouverture …Nous nous souvenons de ce trio, proposé avec Betty/Diane et ce couple. Nous les retrouverons à la fin [..]. Ils sont ceux avec qui Betty/ Diane à voyager, en avion, pour se rendre à Los Angeles.
- Porte d’entrée vers l’enfer d’Hollywood ? (Gardiens, eux aussi, de ces portes de l’enfer ?)
△Un peu de dialogue/ Diane: « J’étais dans tous mes états, j’avais besoin de parler. La femme (Irene): J’attends de vous voir dans un film. Bonne chance, petite Betty, portez-vous bien et soyez PRUDENTE.
▴Nous voyons le couple s’en aller. Et une limousine noire passer à vive allure. Revenons, un instant sur leur curieuse voire très étrange manière de sourire, de rire et d’être. Des comédiens un peu cabots ? Une façon de faire entrer en scène un problème, une mauvaise blague, quelque chose de très peu rassurant. Ils sont narquois, mauvais. Avec eux, s’achèvera le film lors d’une scène difficile emplie de détresse et de violence.

◙ Cette histoire a des allures de huis clos, d’adresse (1612, Hayvenhurst) en appartement (12-17), puis en maison (6980 Mulholland Drive) nous passons d’une intimité à une autre, d’un canapé, à un lit, d’un chez soi à un intérieur de Limousine etc… Laissons Silencio et tous les personnages qui lui sont associés nous faire divaguer encore un peu plus.
↺Un jour, bientôt, nous reprendrons la route en direction de Mulholland Drive pour son bleu magnifique et tous les bleus cinématographiques de David Lynch.
↳ Je vous quitte, en restant bleue, avec un Blow Up spécial Les Chanteuses au cinéma
Isabelle Pompe L, visiteuse d’un soir, 17 février 2021
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.