Depuis de nombreuses années, j’ai construit ma recherche personnelle et professionnelle à partir de situations vécues, de ressentis et d’émotions.
Opening scene serait une entrée en la matière de celles qui décident, de celles qui font tant.
Il n’y a rien de pire que de rater son début – Ingmar Bergman (Carnets)
Ce socle de connaissances dont on m’a si souvent rappelé l’importance, je ne sais si j’en possède un fragment, si mes repères, maisons-mères forment un morceau de cette plinthe.
Mes écrits, fruits indirects de mes lectures, mes images sculptées depuis des dessins, films, œuvres graphiques, BD forment un tout, Chacun son tout sera d’ailleurs le titre d’un de mes écrits antérieurs.
. Faux fils et lignées de faux amis, mes mots sortaient de ce je ne sais où, sans toujours saisir le flux, je laissais voler ces tirs en mettant à disposition crayons, stylos, claviers, cahiers, feuilles, supports…
Toute jeune, la création débarque, le fil à coudre, pas encore à retordre, les inventions, les rôles, mes sources, non inspirées, reposent sur du théâtre télé, des jeux, films et personnages de bande -dessinée.
Sans trop oser l’avouer adulte, le dessin-animé, tel qu’on le nommait à l’époque, fait une entrée très remarquée dans ma jeunesse.
Le dessin, je n’y arrive guère, le fusain, oui parce que c’est noir, le premier personnage que j’imprime au noir c’est Batman, celui des animated series (1992), splendide et impec.
Cette série crée par Bruce Timm et Eric Radomski m’invita à la fidélité. Le choix narratif fera la différence: plonger l’histoire en plein Art déco des années 1940 de New York.
C’est donc au cœur de ce « Dark Déco », que se jouent les intrigues, sans localisation temporelle précise, mais les indicateurs sont les villes, les voitures, son générique (opening titles) vient signer toute son ossature.
Composé d’ombres, de « Bank », d’explosion, de poursuite, de toits, de nuits noires et bleues, il donne chair, en un mouvement, à une création qui fera date.
–Le noir est donc déjà là, tout comme mon orphelinat.
Cette voix de Kevin Conroy, frisson magique, vient interpénétrer mes moments de vie. Les films d’animation vont se faire une place de choix dans mon grand livre culturel, un, démarre cette course folle, c’est Batman et le fantôme masqué – Mask of the Phantasm (1993), accompagnée par Alan Burnett et Paul Dini….J’ai 16 ans, et je pense, encore, aux mondes dissociés (impossibilité d’exercer une profession dans ce qui me passionne).
Ce film d’animation américain réalisé par Eric Radomski et Bruce Timm marque un tournant, il est la porte d’entrée vers un monde insoupçonné, je quitte les livres et m’embarque vers d’autres canevas, beau voyage!
Commence, alors, le fait d’être incomprise…Plus tard, alors que je défendrai Perfect Blue, dans un grand magasin parisien face à une collègue plus que dubitative, je me trouverai devant ce cliché lourdingue d’être reçue comme une ado attardée parce qu’on ne sait pas ce qu’est Perfect Blue et parce qu’on pense encore que les films d’animation sont jeunes publics!
Mes années 90 me feront voyager, les Etats-Unis avec l’univers de Spawn le bien nommé (déjà cité ici spawn-le-romantisme à l’état noir) et le Japon avec des sommets de l’animation, œuvres parfaites, apocalyptiques et militantes.
Ce n’est que de très nombreuses années plus tard, que je visionnerai Akira, ce film fou de 124 minutes!
- Akira (アキラ ) est un film d’animation cyberpunk post-apocalyptique japonais réalisé par Katsuhiro Ōtomo et sorti en 1988. Il est adapté du manga du même nom.
–Perfect blue- Film d’animation japonais de Satoshi Kon, produit en 1997 et sorti en 1999 en France, inspiré du thriller Perfect Blue : Métamorphose d’une idole, écrit par Yoshikazu Takeuchi et publié en 1991.
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Sans en avoir tout à fait conscience, j’évolue dans un monde d’hommes, ce qui n’aidera pas mon intégration, sauf que ceci ne sera mon objectif.
Dans ce passé antérieur recouvert d’image animées, je ne sais combien de références j’ai emprunté, combien de fois j’ai fait le trajet depuis ce fameux fauteuil en velours marron du salon de mes parents, le même qui, des années plus tard, me servira d’antre à l’écriture.
1988, c’est aussi la sortie du Tombeau des Lucioles (Isao Takahata) Studio Ghibli, 1992, Porco Rosso ( film d’animation japonais réalisé par le grand Hayao Miyasaki et produit par le studio Ghibli) mais la culture de la violence survenue, très tôt, dans ma cinéphilie étant ce qu’elle est, je m’arrête net devant Ghost in The Shell de Mamoru Oschii.
1995, une sortie en salles en janvier 97, nous y sommes, tout y est, pour moi, noirceur, sombritude, une héroïne, science-fiction cyberpunk, dont James Cameron dira que c’est « le 1er film d’animation à atteindre un tel niveau d’excellence ».
Largement considéré comme l’un des plus grands films d’anime, ou film d’animation, de tous les temps, les critiques ont particulièrement salué les effets visuels du film, obtenus grâce à une combinaison d’animation celluloïd traditionnelle et d’animation CGI – computer-generated imagery. Echec à sa sortie, je le rate et le découvre à sa sortie en DVD.
Ghost in the shell – Adaptation du célèbre manga éponyme, Ghost In The Shell (GITS) est un animé japonais sombre et apocalyptique. Le film raconte l’histoire du major Motoko Kusunagi, une femme cyborg perfectionné, qui, malgré elle, appartient à une cyber-police ultra puissante et est en proie à des interrogations existentielles sur sa nature. Un jour, alors qu’elle retrouve le légendaire hacker « Pupper Master », elle décide de le posséder et d’en analyser le « ghost » (l’âme), afin de trouver des réponses à ses questions.
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Je n’appartiens à aucune communauté, mes choix sont libres et j’ouvre toujours plus mon réservoir à émotions, sensations visuelles en exergue, point de limite à l’expérience, je ne peux seulement pas minorer mes amours. Alors, quand je dois présenter mon parcours, élaborer des plans au regard de mes architectures culturelles, dresser des stratégies en termes de politique culturelle, je mets, souvent, au défi de ne pas enfermer, dans des tours, mes globes qui n’ont de terrestre qu’une surface visible, à savoir, un titre, un genre éventuel et non un public!
Seul celui qui a des idées personnelles est capable de rendre hommage aux idées d’autrui.
Arnold Schoenberg
Ma volonté première s’exprime avec la combinaison, l’ouverture large, la diversité la plus éclectique avec tout de même, sans mauvaise foi, quelques sommets indéboulonnables. Mon profil professionnel n’est pas chose aisée, j’ai pratiqué, à partir de l’écrit, de la scène, de la photographie, du son, et me tourne dangereusement vers l’image en mouvement. La couture reste au plancher, pratique doudou d’une petite fille de modiste, je n’explore pas cette piste.
Quelles gueules auront mes réalisations ? Le temps de gestation ne me paraît pas anodin, en souhaitant, chaque année qui s’éveille, que je ne m’empêche pas. Par quels plans, sur quelle musique, comment mon métissage d’images va faire son job, vais-je parvenir à sortir de mes propres clous, à ne pas flipper de mes coups de sifflet ? Toutes celles là en sont là, aujourd’hui, jour de 2023.
J’ai été aussi coordinatrice de projet culturel, à même de gérer des enveloppes budgétaires, de créer des programmations, d’aller chercher des artistes sur des terres qui m’étaient totalement inconnues, comme la musique concrète, toujours honnête sur mes limites, je ne suis pas musicienne, j’aime le chant et plus que tout la musique.
Il m’est, encore aujourd’hui, difficile de trouver chaussure à mon pied, ma culture s’est faite de bric et de broc, dedans, dehors, seule, à parfaire, mes heures de visionnages, de sorties cinéma, de lectures et de concerts… Comme je ne privilégie pas de formes- on peine à comprendre le protéiforme depuis nos administrations- d’où la frustration, sans négligence, je me dois d’être dans la construction de boucles temporelles.
C’est le recul qui apporte fixité, le temps pour une œuvre de passer à tous ses états de la matière est long, découvreuse, peut-être pas, mais en recherche, en éveil, certainement!
Je vois. J’ai vu, grâce à une écoute attentive. Je sais la réhabilitation, dans le sens où je sais que la justice artistique, tôt ou tard, offrira la juste place à un.e artiste. Les univers segmentés me révulsent, les populaires versus haute culture tout autant. Le singulier, le hors les clous, voire « le pas toujours très », je n’ai aucun problème à assumer mes incohérences voire même cela ne me déplait pas de les cumuler.
Allez, voir, un jour, au cinéma, le film Assault de John Carpenter, et enfin, l’écouter!
Par la musique, les génériques, je suis entrée. Je ne peux me lasser de certaines B.O, de certains morceaux, de Batman Descent into Mystery (Danny Eflman), dans un désordre complet: Lalo Schifrin, Jerry Goldsmith pour Outland, Oswald d’Andréa (La vie et rien d’autre) Patrick Doyle (L’impasse-De Palma), Badalamenti (Lynch), Henry Mancini, Bernard Herrmann, John Barry, Goblin ( Argento) John Carpenter, Bear McCreary (Battestar Galactica)…Aujourd’hui, c’est Martin Phipps (The Crown) et ses œuvres magistrales dont Aberfan (saison 3) en est un superbe exemple!
Je sais, Pas une seule femme! Les plus invisibles, que les autres professions du cinéma, sont les compositrices de bande originale…
Entorse, comme toujours au règlement, je choisis de ne pas partager un vrai générique pour « illustrer » mon propos…
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Car Columbo est un cas particulier de série télévisée, dans ce sens, et entre autres, où il n’y a pas de générique musical commun à tous les épisodes mais on peut noter les compositions de Gil Mellé (1971/72) qui signe la musique de plusieurs épisodes, en particulier Death Lends a Hand avec l’extra Robert Culp (1971).
Ce même épisode et cette même scène vous emmène tout droit chez Sir Alfred H. avec un bel hommage à l’ Inconnu du Nord Express (première production américaine indé pour Hitchcock, 1951 ), bien placé entre La Corde et Psychose…
- La boucle est bouclée lorsque Janet Leigh joue dans un épisode Forgotten Lady en 1976 – Elle-même personnage de Marion Crane – Psychose.
- Billy Goldenberg -bande originale de la série Columbo- Murder by the book (Steven Spielberg), Suitable for Framing, Lady in Waiting…
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Opening scene parce que je n’oublie pas les génériques, leur place symbolique d’entre-récit, d’avant scène d’ouverture, d’histoire parmi l’Histoire, ceux de Saul Bass possèdent une allure unique. Ce grand graphiste, accompagné de sa femme Elaine – Elaine Bass, musicienne de formation est aussi graphiste de mode, ensemble ils vont offrir au cinéma des génériques, pour le moins, intransigeants.
Le générique c’est l’art du titre, des prémisses, le récit est-il ou n’est-il pas ? Le pas suivant sera pour l’après mais l’ADN est déjà là, tous ces espaces filmiques seront soignés, sculptés par des orfèvres. Œuvre dans l’œuvre, indispensable car il détermine tout!
Un générique porte en lui des structures, des masses, des rythmes, des formes narratives où l’écrit s’inscrit. Avec Saul Bass, maître de la forme, on se tourne vers le Bauhaus (art et technique pour nouvelle unité), on reçoit ce regard engagé sur nos sociétés mais aussi les déconstructions, allant toujours plus loin dans l’inventivité, la créativité…
Les Bass ont crevé l’écran conventionnel, créant, quasiment, les meilleurs génériques pour chaque genre.
Luc Lagier -Blow Up Arte.
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J’imagine, quels visages; quels dos, je pense souvent au tien, j’ai oublié ton timbre de voix, mais est-ce si important ?
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// Je vous recommande deux podcast sur France Musique consacrés à Lalo Schifrin avec Ciné tempo. Schifrin express – ciné tempo
Deuxième prélude au concert Lalo Schifrin, le 3 février prochain, à l’Auditorium de la Maison de la Radio (en direct sur France Musique), avec, cette fois, une plongée dans les années 1970 qui mélange classiques et raretés, l’épisode 2 de ciné tempo
Et parce que j’ai beaucoup photographié des cabines téléphoniques, à Rouen, et ailleurs, je ne vois pas comment je pouvais ne pas faire le lien entre elles, celles rencontrées, croisées, en vrai, celles de mes souvenirs personnelles, et celles de mes images en mouvement.
Quelle plus belle déclaration d’amour, j’ai souhaité faire, sans le savoir, au cinéma…Conversation Secrète (dont j’ai parlé dans the-conversation-the-offense/) Hitchcock, bien sûr, Dirty Harry et son jeu de coups de fil, lieu de passage et de transformation, où l’anonymat, la culture du secret se rejoignent, endroit anxiogène, sujet à quelques brutalités, territoire à mensonges, et ouverture à l’Ascenseur pour l’échafaud…
Rien n’y fait, on passe une bonne partie de sa vie à se tourner autour, jusqu’à ce qu’on comprenne que les câblages sont bel et bien solides, que la cohésion existe et que les enchaînement peuvent être autre chose que des traits d’union.
Ici: cabine-is-coming/ et là: cages-a-suees-les-cabines-telephoniques-de-l’hexagone
Pour finir, avec cette Opening scene, une « mise en ordre » et une lutte contre le contrôle.
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Bons films, génériques, séries, bandes originales, scènes d’ouverture et autres images arrêtées, fixes ou animées!
Un jour de 30, en 2023.
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